Jacques-Alain MILLER, qui se présente comme écrivain et psychanalyste, est, autant que je puisse m'en souvenir, le gendre de Jacques LACAN, le neveu par alliance du Père LACAN, frère du précédent et qui est moine (j'ignore s'il vit toujours) ; monsieur MILLER est aussi l'éditeur des oeuvres du Maître, et, incidemment, il a participé à l'émission dominicale de Michel DRUCKER, Vivement dimanche, comme co-animateur. Il n'apparaît plus dans cette émission, et je ne sais pas pourquoi.
Jacques-Alain MILLER vient de découvrir une nouvelle maladie, que je propose d'appeler le syndrome de MILLER ; cette maladie, c'est la maladie de la vérité. Si, si ! Dans un article récemment publié (Le Point, n°1906, 26 mars 2009), intitulé "Le pape est malade de la vérité", Jacques-Alain MILLER s'efforce de décrypter les raisons des propos de Benoît XVI, et de décrire les principaux traits de sa personnalité. Il faut y prendre garde. L'article est intéressant. Il est celui d'un érudit, et d'un homme qui croit qu'il pense et qui pense parfois. Mais il est faux, illogique et contradictoire.
Je vais donc essayer de faire une analyse de texte, vous montrer comment il est possible de connoter un discours pour orienter l'opinion des lecteurs dans le sens que l'on désire.
Premier paragraphe : Le cardinal RATZINGER ne passait pas pour un progressiste ; il fut le lointain successeur de TORQUEMADA le Grand Inquisiteur (je frissonne !) ; c'est le Panzerkardinal (on voit les colonnes de chars allemands manoeuvrés par des évêques belliqueux qui entendent conquérir le monde). Il faut que les services du Vatican émondent les propos pontificaux, et ils le font en ajoutant gaffes sur gaffes. Benoît n'a pas pris la mesure de sa fonction (monsieur MILLER, lui, la voit bien ; que n'est-il pape !). Devenu pape, il n'a pas dépouillé le vieil homme (belle figure de style qui renvoie à un propos évangélique sur la nécessité de se dépouiller du vieil homme, et du péché, pour renaître dans le Royaume). Le décor est donc planté : nous avons devant nous un vieillard remarquablement intelligent certes (monsieur MILLER y consent), mais entêté, potentiellement violent, et irréductible.
Deuxième paragraphe : Monsieur MILLER compare Jean-Paul II et Benoît XVI. Ah ! Jean-Paul II, personnalité rayonnante, expérience du monde, et (c'est du moins ce qu'on a dit en confidence à monsieur MILLER) expérience des femmes. Grand rusé (Oh ! oh ! Le tableau s'assombrit), une bête de scène (il devient franchement show-bizzique), un homme du Verbe, sachant parler à la multitude et la SÉDUIRE (comme le Prince de ce monde, monsieur MILLER ? Légère erreur d'analyse). Benoît XVI ? Un homme des livres, un érudit, qui aime jouer du piano DANS LA SOLITUDE (voilà bien qui est impardonnable ; il devrait jouer au milieu de la Place Saint-Pierre, faire la quête, et l'envoyer aux pauvres Églises d'Afrique), HABILE (encore une propriété du diable) à faire parler les textes. Il est franc comme l'or, il dit tout haut ce qu'il pense. Là est son tort. (Monsieur MILLER devrait envoyer en Colissimo un exemplaire du Prince. MACCHIAVEL aurait des choses à apprendre au Pontife ! A moins, plus probablement que monsieur MILLER ne se moque ; j'aurais tendance à pencher pour cette deuxième hypothèse). Tel l'Alceste de MOLIÈRE, Benoit XVI est malade de la Vérité. Sous prétexte (je ne vois pas bien ou est le prétexte, défini comme fausse raison avancée pour justifier une opinion ou une décision ; le "croyant que" serait sans doute une expression intellectuellement plus honnête), sous prétexte, donc, que la Vérité serait une et éternelle (le conditionnel indique quel crédit monsieur MILLER donne au concept de vérité; on y reviendra), il la prend au pied de la lettre (j'avoue que prendre les propos de monsieur LACAN au pied de la lettre me pose gros soucis et problèmes énormes, j'ai besoin qu'on m'interprète ; monsieur MILLER est là, Deo gratias, pour le faire. Il semble que seul papa FREUD ait donné une parole à prendre ainsi). Benoît XVI méconnaît LOYOLA qui dit que toute vérité, y compris la Vérité (je n'arrive pas à comprendre si, à ce point, monsieur MILLER prend le Vérité avec un V majuscule comme elle doit être entendue ; le propos est ambigu). Il ne faut pas la claironner, mais l'insinuer, la rendre aimable (voyez-vous ça !). Il ne faut pas l'énoncer en tout lieu (mais saint Thomas d'AQUIN dit qu'il faut en tout lieu et en tout temps proclamer la Vérité Etiam in perilium, même dans le danger). Figurez-vous, qu'en définitive "c'est l'auditeur qui décide du sens du discours qu'on lui adresse". Voilà qui s'appelle expliquer ce qu'est le dialogue. Au secours HABERMAS !
Troisième paragraphe : C'est l'estocade. Prédication au Kärcher, vacarme, (à quoi s'ajoute le propre vacarme de monsieur MILLER, qui ressemble étrangement au bruit des cymbales - cf. Première Épître de Paul aux Corinthiens), débandade. Il inquiète, il indigne, le pape, il fait rire les siens, les autres, et particulièrement monsieur MILLER auquel l'éminente fonction de psychanalyste confère un discernement extra-lucide, et un sens médical aigu, puisque nous voilà devant la maladie de la vérité. Comme je souhaiterais que ce fût une maladie contagieuse et qu'elle vienne toucher monsieur MILLER.
Monsieur MILLER n'a pas lu Ignace de LOYOLA. Il nous dit (et je crois que c'est dans ses Exercices) que le diable nous attaque toujours au point faible de notre forteresse. Je me demande si le point faible de la forteresse millérienne n'est pas la certitude qu'il n'y a qu'un point de vue qui vaille : le sien. Pourtant, il y a des choses très justes dans cet article, notamment sur la manière, les circonstances et les lieux où l'on annonce la Parole. C'est l'absence totale de bienveillance qui en invalide la pertinence. En fait, il ne faut pas donner des perles aux cochons. Les médias africains (cf. l'article du Cameroon Tribune dans un de mes récents billets) ont reçu les perles. Les médias français ne méritaient pas qu'on les leur donne, pour la raison que je viens de dire.
C'est cela qu'il fallait argumenter, au lieu d'utiliser de vieilles ficelles rhétoriques.
Il ne m'en voudra pas, s'il lit ces propos (j'en doute). Mais trop, c'est trop !
1 commentaire:
mais non, c'est Gérard Miller qui apparaissait chez Drucker. Psychanaliste, à l'égo surdéveloppé, anar sur les bords et anticlérical au milieu. Ne mélangeons pas pour éviter les manipulations!!!
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