Vous me direz que je suis saisi par un prurit d'écriture. Mais je n'ai pu pour diverses raisons produire mon billet quasi quotidien, et il faut bien que je me rattrape un peu.
Quand on a vu les peintures chinoises du Musée CERNUSCHI, les icônes du MONT-ATHOS au Petit Palais, les primitifs italiens de la collection ALTENBOURG au Musée JACQUEMART-ANDRE, on ne peut qu'être saisi par la laideur, la vulgarité, l'obscénité de l'art contemporain. Marc FUMAROLI, l'auteur de L'Etat culturel a produit un article remarquable dans le Journal La Croix du vendredi 24 avril ; intitulé Une débâcle prévisible, il fustige les tendances actuelles de la "Culture". Jean CLAIR, juste au-dessous de cet article-là, publie des réflexions consonantes dans un autre article dont le titre dit tout : Du sacré au trivial. Nos deux immortels remettent à leur place les cultureux, et autres bateleurs de la culture de foire.
Marc FUMAROLI :
[Le] beau mot antique [de culture], à la fois paysan et noble, aussi fécond et fertile que le mot agriculture s'est trouvé métamorphosé et stérilisé depuis les années 1970 en un vaste sac, où l'on a enfourné tags, rok, teknival, sexe et drogues ("la culture jeune"), sports industrialisés et commercialisés ("culture football"), moeurs de coterie ou d'ethnie délocalisée ("culture gay", "culture room", "culture de banlieue"), une "fureur de lire" orchestrée publicitairement dans tout le pays pour inviter en vain les alcooliques des écrans à ouvrir un livre ou un journal, une "France Culture" nivelée "aux problèmes de société" et restreinte aux "débats de société", voire, pour faire bonne mesure, quelques louchées de cette "culture distinction", plus ou moins odieuse, dont une pseudo-élite s'accapare et par où elle prétend se reconnaître entre soi, à force d'allusions à Saint-Simon, à Flaubert, à Proust, à Seurat, à Mozart ou de références mystérieuses aux grands noms exotiques de "l'art contemporain", Warhol, Koons, Hirts, Kohlaas.
Jean CLAIR :
Aujourd'hui, [...], on est tombé avec le "culturel" au niveau des "latrines", des "déchets" selon Thomas MANN : Jeff KOONS, Damian HIRST, Jan FABRE, SERRANO et son Piss Christ, et avec eux son compagnon accoutumé de l'excrément, son double sans odeur : l'or, la spéculation, les ventes aux enchères faramineuses, obscènes.
Et c'est ainsi que, peu à peu, se sont différenciées l'une de l'autre, la "haute culture" et la "basse culture". Le peuple, le noble peuple, s'est vu interdire l'accès à la pensée des génies, à la musique des grands compositeurs, aux tableaux des plus grands maîtres. Pour faire de l'argent, les puissances financières lui ont proposé des oeuvres musicales de pacotilles, des films misérables, des manifestations de foule complètement hystériques, et ont réservé aux nouveaux riches d'horribles tableaux où le sacrilège se prend pour de l'innovation, l'obscène pour de l'audace, et la nullité des savoir-faires picturaux, musicaux ou littéraires pour le minimalisme des ascètes de l'esprit. Pendant ce temps, quelques bénédictins passionnés continuent de hanter les bibliothèques, d'accumuler des savoirs qui ne serviront qu'à des élites intellectuelles coupées des forces vives du peuple français, qui fut, dit-on, le plus spirituel du monde.
Voilà où mène l'idéologie de la culture pour tous, diffusée par les officines culturelles. A l'imposture. Mais le désir du beau n'est pas l'apanage des bourgeois ou des aristocrates ; il traverse toutes les couches de la société. Et certaines d'entre elles, au nom de cette idéologie, se voit barrer l'accès aux plus hautes activités de l'esprit, par le mépris que manifestent nombre de diffuseurs de la culture vis-à-vis d'elles. Mais je connais des bergers qui, dans la montagne de SISTERON, goûtent mieux la poésie de GIONO que les baveurs de France Culture, et parlent en philosophes mieux que monsieur ONFRAY, et aussi bien que monsieur COMTE-SPONVILLE.
Robert, Fernande qui n'êtes plus, Petit et Grand Gilbert, et tant d'autres, j'ai appris de vous bien des secrets voilées jalousement par les étoiles aux yeux des "savants", j'ai goûté sans que vous passiez par les mots, ce qu'est la fraternité et le respect, l'amour du beau et du silence. Et près de vous, je suis devenu plus humain et plus vrai.
1 commentaire:
Bien, nous y voilà! Au dela du "titillage" dont vous parliez il y a quelques temps, j'essaie de traduire vos mots, pensées, pour les comprendre.Je n'ai pas eu la chance d'être éveillé à tous ces arts, à toutes ces cultures. Je suis intéressé par la musique classique, mais incapable d'assister à des concerts compte tenu du coût des bonnes places. Que l'on veuille ou non, l'accès à beaucoup de réalités culturelles restent fermées à beaucoup. Je ne pleure pas sur mon sort, mais quand je "tombe" sur un blog comme le votre, j'y fonce. Pourquoi? Parce que j'y sens, en m^me temps que de la culture, de la scioence, à un trés haut niveau, de l'humanisme, de l'amour pour les autres. Mais pourquoi y vois-je aussi, peut-être, une certaine naïveté comme si l'on vous "utilisait". Et puis, n'omettez pas de répondre à certaines réponses de ma part, même si elles vous titillent (cf, 2 réponses dernièrement). Bien à vous.
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