mercredi 13 mai 2009

Eblouissement

Si par un très grand hasard j'ai quelques lecteurs parisiens, je les encourage à aller, toute affaire cessante, au Musée CERNUSCHI. Il s'y tient une exposition temporaire consacrée à la peinture chinoise. Les oeuvres exposées viennent du fonds du Musée lui-même, et certaines d'entre elles ont été restaurées avec un soin prodigieux. Vous y trouverez des oeuvres produites sur une durée de six siècles, des MING au QING.
D'abord des paysages sur des rouleaux verticaux ou sur des éventails : prodigieux de finesse, de raffinement, de sérénité. Ce sont en général des monochromes, dans les noirs ou les bleus foncés, avec cette disposition si particulière aux peintures chinoises, celle d'une perspective cavalière. Les feuilles des bambous, des érables, les aiguilles des pins, les troncs torturés, les brouillards qui s'étendent entre les plans superposés (justement parce que les peintres chinois ne connaissaient pas les règles occidentales de la perspective) sont rendus avec une force et en même temps une harmonie qui portent tout simplement à la contemplation. Les grands artistes chinois jouent du vide et des blancs avec une virtuosité qui laisse pantois. Les monochromes sont propres à l'école du Sud. L'école du Nord produit des paysages colorés. L'un d'eux est reproduit sur la page de couverture du catalogue. Des verts et des bleus superbes.
Sont exposés aussi des tableaux de personnages, dont un, juste à l'entrée de l'exposition a été merveilleusement restauré. Ce qui est stupéfiant, dans ce cas, c'est la fermeté du trait ; il a jailli d'un seul mouvement, mais l'on devine, on sent que le geste a été longuement réfléchi avant d'être exécuté. Certains tableaux de personnages en pied, dons d'Henri CERNUSCHI lui-même, sont incroyablement expressifs.
Et puis il y a des tableaux de peintres chinois modernes et contemporains. Ce qui me frappent dans ces oeuvres prodigieuses, c'est la persistance d'une tradition artistique multiséculaire jointe à une modernité, soit des sujets (comme une piéta ou des nus), soit du style (comme ces fleurs de magnolias ou ces pivoines).
Ah, Chine, Orient lointain et mystérieux, Orient profond et multiple, que tu es chère à mon coeur. L'exposition qui est consacrée aux oeuvres des artistes à qui tu as donné le jour me laisse sur un éblouissement intérieur, et une extrême jubilation pour tant de beauté, une beauté qui est comme une prière au Dieu inconnu.

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