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Au lieu d’un château fort dressé au milieu des
terres, pensons plutôt à l’armée des étoiles jetée dans le ciel.
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ALBERT
CAMUS JUGE LA PRESSE DE SON PAYS.
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"À
une ou deux exceptions près, le ricanement, la gouaille et le scandale forment
le fond de notre presse. À la place de nos directeurs de journaux, je ne m’en
féliciterai pas. Tout ce qui dégrade la culture raccourcit les chemins qui
mènent à la servitude. Une société qui supporte d’être distraite par une presse
déshonorée et par un millier d’amuseurs cyniques, décorés du nom d’artistes,
court à l’esclavage malgré les protestations de ceux-là même qui contribuent à
sa dégradation."
Albert
CAMUS.
Entretien
donné en 1951 à la revue Caliban (cité
par J.-C. GUILLEBAUD dans un livre dont je reparlerai.)
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ET
PHILIPPE MURAY ENFONCE LE CLOU !
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Il
parle ici des Nuits blanches parisiennes!
"Vers
une heure matin, au fond du XIIIe, le long d’une ancienne usine d’air
comprimé, on se bousculait pour humer un parfum spécial présenté comme l’interprétation sous forme olfactive de
l’usine en question. Près de moi, un jeune couple hésitait. Mais la fille l’a
emporté. « On reste l’ai-je entendu dire à son compagnon, parce que sinon. »
Sinon quoi ? Ce sinon en suspens définitif s’accordait parfaitement à
cette nuit conçue par ses organisateurs comme « un parcours initiatique ».
Initiatique de quoi ? La question ne se pose pas. Certes, dans les temps
reculés, quand on s’initiait c’était à quelque chose, aux mystères d’Eleusis,
aux mathématiques, au plaisir sexuel ou à la grammaire. Il n’en va plus de même
lorsque les charlatans infatigables de l’événementiel
sont au pouvoir et qu’ils n’ont d’autres projets que de vous initier à l’événementiel,
qui lui-même n’est qu’un rien démentiel, c’est-à-dire de tester votre
obéissance. La nouvelle dénomination est intransitive. Elle se moque des
compléments d’objets d’autrefois. Elle nous initie.
Elle n’a pas besoin de dire à quoi. On le saura bien assez tôt."
In
Philippe MURAY.
Moderne contre moderne. Exorcismes
spirituels IV. Essais. Chapitre Nuit blnche gravement à la santé.
Les Belles Lettres, Paris, 2010 [quatrième
tirage]. (Page 108.)
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COMMENTAIRES.
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CAMUS
parle de la presse et des « artistes », MURAY du dévoiement et de l’intransitivité
de l’art. Je n’aurai qu’un seul commentaire. Il tient dans une photo, celle de
statues colonnes de la cathédrale de CHARTRES, que l’on veut avantageusement
remplacer par une heure de contemplation nocturne du portail sud. Voilà qui
vaut bien les nuits blanches et se moquent des approbations enthousiastes du
journal L’aliénation (Libération !
du
Nouvel observateur
lequel
doit observer, comme jadis Néron l’incendie de Rome à travers son émeraude, l’incendie
de Paris par les pyromanes de l’anti-culture. Des centaines, des milliers de
personnes ont fait la queue pour sentir l’odeur d’une ancienne usine d’air
comprimé ! Si ce n’est pas la servitude, ç y ressemble fort.
Le
parieur préfère l’ombre des saules qui bordent les fontaines de nos campagnes,
le grand silence de midi qui s’abat sur les moissons tremblantes et la
déchirante douceur d’un soir qui voit naître peu à peu les étoiles. Là, le
parieur s’initie aux beautés de la création. Est-ce trop demander à nos contemporains
de faire ces expériences inoubliables ?
Statues colonnes du portail Sud. Cathédrale de Chartres.
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