-
Au lieu d’un château fort dressé au milieu des
terres, pensons plutôt à l’armée des étoiles jetée dans le ciel.
-
Dans
le commentaire qu’il a laissé sur Facebook, Marc RUGGERI faisait remarquer que
Jean BASTAIRE fut un très grand auteur chrétien, trop méconnu, et pourtant maître
d’une langue admirable. Vous allez pouvoir en juger par ces quelques aphorismes
tirés d’un libre absolument merveilleux, intitulé Court traité d’innocence dont j’ai déjà donné les références. Il me
semble que la réflexion de Jean BASTAIRE, si bien salué par Jean-Claude
GULLEBAUD dans son ouvrage La foi qui
reste, est de nature à nourrir celle du parieur bénédictin. Jugez-en
plutôt.
-
QUELQUES
APHORISMES DE JEAN BASTAIRE.
-
Page
9. "L’émerveillement, la confiance éperdue, sont une extraordinaire école
de pénétration spirituelle."
Page
10."Les seules certitudes que l’intelligence puisse fournir sont précaires
et comme elle périssables. Il n’y a de stables que les certitudes intimes, les « vérités
sensibles au cœur ». La grande duperie moderne est de nous détourner des
secondes au profit des premières."
"L’intelligence
sert à décaper le réel qui s’encrasse. Indispensable besogne. Mais il faut
prendre garde à ne pas dépasser la dose, si l’on ne veut pas que l’acide de la
pensée détériore la substance des choses."
"Au
soupçon qu’instaurent les sciences de l’homme, répondons par l’innocence. Ce qui
ne nous empêchera pas de chercher innocemment à comprendre."
"Je
ne pardonne pas à mon époque d’ôter l’espoir aux petits et aux pauvres. À tout
le monde, car nous sommes tous petits et pauvres devant la mort."
Court traité d’innocence. Chapitre Foi.
Lethielleux,
Paris/Culture et Vérité, Namur, 1977.
-
ET
QUELQUES CONTREPOINTS PIQUÉS ÇÀ ET LÀ.
-
UN
CONTREPOINT DE PHILIPPE MURAY OU QUAND L’INTELLIGENCE DECRASSE LE RÉEL.
"[…].
L’époque actuelle, mélange d’exhibitionnisme obligatoire et de harcèlement
judiciaire (ce que je nomme la coalition exhibo-pénalisatrice), pourrait trouver
ses sources aussi bien dans la secte « licencieuse » des barbélognostiques [il s’agit d’une secte gnostique dont parlent du reste
plusieurs traités gnostiques trouvés à NAG-HAMMADI] que dans la terreur
puritaine des révolutionnaires. Mais celui qui a encore le mieux résumé la
situation, c’est le Chigaliov des Démons
de DOSTOÏESVKI Quand il présente son système de gouvernement : « Partant
de la liberté illimitée, j’aboutis au despotisme illimité ». Sauf qu’aujourd’hui
les deux coexistent, qu’on ne part plus de l’un pour arriver à l’autre, qu’on
les a ensemble sur le dos, et que, si l’on entreprend d’ouvrir les yeux sur ce
phénomène aux burlesques et redoutables conséquences, les nouveaux actionnaires
ou leurs valets vous traitent de partisan de retour à l’ordre. Quel retour à l’ordre ?
C’est eux, et eux seuls, l’ordre ; le délirant, l’effrayant, l’abominable,
l’invivable, l’irrespirable ordre nouveau du Nouveau Monde."
In
Philippe
MURAY.
Moderne
contre moderne. Exorcismes spirituels IV. Quatrième tirage.
Chapitre
Une ironie sanglante. (Page257.)
Les
Belles Lettres. Paris, 2010.
-
CHRISTOPHE
GUILLUY ILLUSTRE MAGISTRALEMENT CE QUE DIT JEAN BASTAIRE SUR LES PETITS ET LES
PAUVRES.
"Pour
la classe dominante, la défense même de gens ordinaires devient suspecte. Pour
avoir évoqué la « décence commune des gens ordinaires », leurs
valeurs traditionnelles d’entraide et de solidarité, le philosophe [il s’agit
de Jean-Claude MICHÉA] s’est retrouvé sur la liste des dangereux
« réactionnaires » (autre synonyme de fasciste), bref, de ceux qui
« font le jeu de ». La technique est d’ailleurs utilisée pour tous
les chercheurs ou intellectuels qui auraient l’audace de proposer une autre
représentation du peuple et de ses aspirations. De la démographe Michèle
TRIBALAT au philosophe Michel ONFRAY, la liste des « fascisés »
s’allonge inexorablement au rythme de la délégitimisation de la classe
dominante. On pourrait multiplier les exemples, mais la méthode est toujours la
même : fasciser ceux qui donnent à voir la réalité populaire."
In
Christophe
GUILLUY.
Le
crépuscule de la France d’en haut. (Page 175.)
Flammarion,
Paris, 2016.
-
ET
CONTREPOINT FINAL DE CHESTERTON SUR LES VÉRITÉS SENSIBLES AU COEUR.
-
"Ce qui ne vas pas avec le culte du
service c’est que, comme beaucoup de
notions modernes, c’est une idolâtrie du moyen au point d’oublier la fin. C’est
un peu comme avec le jargon des idiots qui parlent de l’efficacité sans considérer du tout la notion de l’effet. Le péché de service c’est le péché de Satan :
essayer d’être le premier là où l’on ne peut être que second. Un mot comme Service a volé la majuscule sacrée à ce
qu’autrefois il était censé servir. Il y a bien un sens à servir Dieu et même
un sens, encore plus disputé, à servir l’homme. Mais il n’y a pas de sens à
servir le service. Servir Dieu c’est au moins servir un Être idéal. Cet idéal a
des attributs précis et même dogmatiques : la vérité, la justice, la
miséricorde, la pureté, et d’autres. Servir un tel idéal, bien qu’imparfaitement,
c’est servir un concept précis de perfection. Mais l’homme qui se précipite le
long de la rue, agitant les bras et cherchant quelque chose ou quelqu’un à
servir, tombera probablement entre les mains d’escrocs ou dans un repaire de
brigands et d’usuriers, et il se retrouvera de fait à les servir avec diligence. […]."
In
Gilbert Keith CHESTERTON.
Pourquoi je suis catholique. Préface de
l’abbé François-Marie CHAUTARD. Traduction collective dirigée, revue et annotée
par Wojciech GOLONKA. (Page 34.)
Via Romana/Institut Universitaire
Saint-Pie X, Versailles, 2017. (Distribué par Salvator.)
-
COMMENTAIRES.
-
Évidemment,
entre le langage éruptif de MURAY, l’examen clinique et terrible de GUILLUY et
l’humour de CHESTERTON, il y a de grandes différences. Mais si vous y réfléchissez
bien, ces textes illustrent, chacun à sa manière ce que BASTAIRE dit du drame
de la pauvreté, et du désespoir du monde tel qu’il va, du déni de la réalité qui
aboutit à ce que des ministres, de vrais crétins, s’élèvent contre les opinions
personnelles et intimes du Dr de ROCHAMBEAU, et par conséquent transforment la
liberté totale en despotisme total, et du renversement des fins au profit des
moyens, de la mise de côté des effets au profit de l’efficacité. C’est cela le
Nouveau Monde post-moderne. Et c’est contre cela que les crétins qui dénoncent
le populisme, du haut de leur arrogante supériorité sociale, ne méritent qu’un
sort : celui du mépris de leurs opinions (non pas des personnes bien sûr)
et celui de l’écoute attentive de la plainte du Peuple contre le sort qui lui
est fait et qui est celui de l’ignorance de son état réel.
Aucun commentaire:
Enregistrer un commentaire