samedi 28 octobre 2017

28 octobre 2017. Lettre du Pérou (1).

Chers lecteurs, souventes fois j’ai vanté cette jeunesse française magnifique, profondément ancrée dans l’amour de Jésus-Christ et généreuse. Voici un exemple parmi d’autres, celui de Marie. J’ai reçu de Marie l’autorisation explicite de diffuser ses lettres. J’en extrairai  régulièrement les passages les plus saillants qui illustrent le sens de son engagement auprès des pauvres d’Amérique du Sud. 

J’ajoute, en contrepoint de ces témoignages, que j’ai appris ceci hier soir : les grandes entreprises agricoles du pays d’Arles (légumes, primeurs et fruits) font venir de plus en plus des travailleurs saisonniers du lointain pays sud-américain qu’est l’Équateur. Ainsi, pendant que des jeunes audacieux s’efforcent d’améliorer sur place le sort des pauvres de ces pays, il y a des exploitants agricoles qui embauchent temporairement des journaliers des nations andines et circonvoisines, les logent dans des caravanes et ne les payent même pas au SMIC. Décidément, ils méritent bien leur nom d’exploitants.

Voici donc deux extraits de ces Lettres du Pérou. Il en viendra d’autres.

"Je prends le temps de vous écrire quelques mots pour vous partager mes premiers pas dans la capitale péruvienne. Je suis partie le samedi 16 septembre – après des au-revoir émouvants et un peu irréalistes – avec George, autre volontaire d’INIGO (association jésuite avec laquelle je  suis partie). Les 12 heures de vol passées ensemble ont été assez troublantes car nous car nous avons alors vraiment pris conscience de notre départ. Et notre sentiment d’être déracinés ne faisait que commencer. Personnellement, je me demande parfois si partir comme ça relève du courage ou de la folie ! Enfin, c’est ce qui en fait le charme, je l’espère en tout cas…[…]."

Après être restée quelques jours à LIMA, Marie est partie à TACNA pour s’occuper d’un centre d’accueil pour des enfants de familles pauvres. Voici un extrait de sa troisième lettre.

"[…].
Ma mission a évolué depuis mon arrivée. Si le Temps de l’observation n’est pas terminé,  mon champ d’action est désormais moins restreint. Pour l’instant, j’ai encore du temps pour moi le matin je suis en train d’apprendre – quand Milagros a du temps pour moi  à effectuer son travail car elle finit son stage ici début décembre. Globalement, je dois faire de l’administratif (un peu comme un CPE dans les lycées français), recevoir les parents et comprendre les problèmes qu’ils peuvent rencontrer puisque tous les enfants qui viennent au centre connaissent de grandes difficultés familiales et financières. Je dois également effectuer des visites domiciliaires quand les familles n’ont pas les moyens de se rendre au centre qui peut être loin de leur résidence. Même si les premiers jours, j’ai été heureuse d’avoir du temps pour moi, le désir de se sentir utile et efficace (besoin très européen, by the way) a fini par rejaillir. Ma tête était pleine de nouvelles idées et de nouveaux projets pour les enfants…Jusqu’à vendredi dernier, je n’avais pas encore fait de visites domiciliaires. Comme Milagros n’était pas disponible, j’ai demandé à Kelly si je pouvais l’accompagner. Nous nous sommes donc rendues à l’Hôpital de Tacna pour rencontrer une maman adolescente de 16 ans dont le bébé de 3 mois est atteint d’une grave maladie. Kelly a alors posé des questions à la maman pour savoir comment elle allait car l’enfant venait de subir une opération Je suis restée silencieuse pendant deux heures et ai tenté de comprendre leur échange. Même si je n’ai pas saisi tous les détails, toutes les nuances, j’ai compris l’essentiel et ai capté toutes ses émotions. Cette jeune maman doit faire face quasiment seule à la maladie de son enfant alors qu’elle se trouve elle-même dans une situation de grande précarité. Par ailleurs, elle n’a pas le soutien de son copain et de sa « belle-mère » qui souhaitent qu’elle fasse adopter l’enfant. J’ai donc assisté à des échanges téléphoniques très durs entre la jeune maman et la belle-mère. Je me suis sentie démunie car je n’étais  pas assez à l’aise dans sa langue pour pouvoir la réconforter (grâce à la prépa, j’ai le vocabulaire pour décrire des problèmes sociétaux ou pour donner mon opinion mais je n’ai pas le vocabulaire du quotidien). Moi qui ai l’habitude de mettre des mots sur mes émotions pour que celles-ci ne me submergent pas, ici c’est difficile car je ne peux pas encore recourir à ma plus grande ressource : la parole. Je dois également apprendre à trouver la bonne distance intérieure par rapport au « patient ». Mais je suis entourée de travailleurs sociaux, donc c’est l’occasion d’apprendre à leurs côtés. Je choisis de vous raconter cet épisode car il est à la fois découverte et annonce. Découverte car ce fut une expérience nouvelle et annonce car je compte bien y retourner pour apprendre et comprendre.

[…]."

Que Dieu bénisse ces jeunes et fasse que leur action porte du fruit.

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