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Au lieu d’un château fort dressé au milieu des
terres, pensons plutôt à l’armée des étoiles jetée dans le ciel.
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L’EUROPE
ET LA MORT.
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"Ce sont
surtout les individus européens que l’on pousse à disparaître dans
l’unification européenne, et à oublier l’Europe aux anciens parapets, aux
divisions, aux conflits, aux différenciations, aux immenses œuvres d’art aussi
et surtout. La « construction européenne » est la destruction du
passé et de la mémoire de l’Europe. On incite les Européens à entrer dans le
sarcophage européen au nom de la sécurité et du principe de précaution qui sont
l’essentiel programme politique et idéologique de l’Europe actuelle ; et
ce programme ne pourrait être appliqué si subsistaient les anciennes frontières
et les anciennes divisions, pas seulement géographiques mais intimes aussi et
d’abord (d’où la nécessité de l’apparition d’un nouvel homme subjectivement
unifié dans un univers qui l’est objectivement). […]. En réalité, l’Europe et
l’Amérique avec des moyens certes différents, se nourrissent de la même
religion de la sécurité, où l’instinct de conservation remplace la vie, et où
la guerre au risque (comme aux dissidences résiduelles et aux négativistes) est
la seule guerre encore envisageable, et aussi probablement la dernière, et la
seule source d’aventures quand l’Histoire s’est retirée. Tout l’Occident
moderne est marqué par cette obsession, qui lui donne sa couleur à la fois
grotesque et à mourir d’ennui. Ici comme ailleurs, il s’agit pareillement
d’empêcher les morts de mourir. La guerre américaine contre le terrorisme
(légitime, sauf que dans le cas de l’Irak, elle s’est bien entendu trompée de
cible) relève de l’assurance-vie obsessive, comme la construction européenne.
Dans les deux cas, la mort anticipée règne. Et la prévention de la mort est le
seul programme proposé aux vivants. C’est le seul avenir que l’on ait à leur
indiquer, et le chemin pour y aller est unique : il n’est pas historique,
il est médical. Comme tel, c’est un terrorisme rationnel et bienveillant, mais
c’est un terrorisme."
In
Philippe MURAY.
Moderne
contre moderne. Exorcismes spirituels IV. Essais. Quatrième tirage.
Chapitre
Les métamorphoses. (Pages 290 et
291.)
Les
Belles Lettres, Paris, 2010 (pour la présente édition).
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CONTREPOINT
DE JULIEN BENDA.
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"D’autres, pour servir la paix,
invitent les peuples à se fréquenter davantage, à se visiter les uns les
autres, les assurant qu’ils éteindront ainsi dans leurs cœurs le sentiment de
leurs différences, prendront conscience de leur communauté de nature. Rien ne
semble moins prouvé. On peut admettre, au contraire, que la fréquentation de
l’étranger ne nous fait sentir que plus vivement notre différence avec lui. Ce
qu’il faut enseigner aux hommes, c’est à abolir le sentiment de leurs
différences en s’appliquant à se sentir chacun dans sa région d’humanité
supérieure à ces différences ; chose qu’ils peuvent fort bien faire, et peut-être
mieux, en demeurant chacun à son foyer. La
paix sera, pour les hommes, le fruit d’un travail de vie intérieure, non de
promenades à la surface du globe. Mais c’est toujours le même esprit :
prétendre donner aux hommes par des moyens mécaniques, et en n’exigeant rien de
leur force d’âme."
In
Julien BENDA.
Discours
à la nation européenne. Préface d’André LWOFF. (Collection Folio, série Essais,
n°209). (Page 115.)
Gallimard,
Paris, 1992 (date du dépôt légal).
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COMMENTAIRES.
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Il
est tout de même curieux que deux esprits supérieurs en arrivent par des
chemins différents aux mêmes conclusions. Quel rapport avec le pari bénédictin
allez-vous me dire ? Il est très clair. Il est plus que très clair. Au VIe siècle, à la mort de saint Benoît
de Nursie (en 547 au mont très CASSIN), fondateur de l’ordre des bénédictins,
il existait déjà un grand nombre de monastères de son ordre, en France, en Irlande,
en Suisse, en Italie. Il serait trop long, inutile et fastidieux d’en donner la
liste. Nombre d’entre eux existent encore. Alors que les hordes barbares venues
de l’Orient européen déferlaient sur l’Europe occidentale, ils perpétuaient la transmission
des textes bibliques et philosophiques, étaient des hauts lieux de culture,
travaillaient de leurs mains la terre, produisaient de très grands artistes et
brillaient comme des feux splendides au sommet d'une civilisation grandement menacée Les
monastères, îlots de prière et de culture, attiraient dans leur voisinage un
peuple de pauvres qu’ils enseignaient, soignaient et nourrissaient ; ils soustrayaient aux violences des barbares des pans entiers de nos patries et
perpétuaient le meilleur de l’humanité. Les monastères communiquaient entre eux
en latin, et ils formaient une confédération, et non point un bloc unique de
structures tenues d’obéir à un grand chef, non élu et tout puissant. Leurs
abbés étaient des hommes de sainteté. Bref ils formaient une sorte de
contre-modèle de société qui bientôt s’opposerait aux rois, aux empereurs, à tous ces
princes de la terre qui auraient bien voulu les soumettre à leur pouvoir. Bref,
ils étaient libres, de cette liberté que Jésus avait promis à ses disciples en
leur disant : « Ma vérité vous rendra libres ».
Pour
avoir fait à plusieurs reprises de courts séjours à l’abbaye bénédictine de TRIORS,
une fondation de l’abbaye de FONTGOMBAULT, j’ai palpé, j’ai senti ce grand
courant de prière et de sainteté venu du fond de nos âges et qui se transmet
par capillarité aux nouveaux venus (de très jeunes gens, souvent très fortement
diplômés) et aux habitants des alentours (sans doute la chose qui m’a le plus
frappé). L’Europe bénédictine a existé. Ce n’est pas l’Europe des eurocrates,
et, pour ce qui me concerne, je ne donnerai jamais mon suffrage à des candidats
qui la soutiennent. SALVINI, ORBAN et d’autres, en dépit de certains excès,
défendent une civilisation qui par lâcheté se laissera périr volontairement pour perpétuer le
mythe du progrès économique capitaliste indéfini, et celui de la liberté
indéfinie qui ne cesse de réclamer de nouveaux droits, tous plus extravagants
les uns que les autres. Ils ne le veulent pas, et ils ont raison.
Je
n’ai aucune honte à prophétiser avec Venance FORTUNAT : Vexilla regis prodeunt !
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