De
madame Aline LIZOTE, ce texte sur l’affaire FILLON.
(Je
note avec intérêt qu’elle reprend à son compte la fameuse interpellation de
Cicéron que j’avais moi-même utilisé dans un billet récent)
Publié
le 7 février 2017 Fillongate 2 :
une
seule issue, la colère du peuple Quousque tandem abutimini, vos, patientia
nostra ?1 (Oui, jusques à quand abuserez-vous de notre patience ?) L'affaire
Fillon, qui semble se tasser, mais non se régler, dépasse largement la personne
même de l'ancien premier ministre. C'est toute une partie de l'électorat qui a
été prise à la gorge et qui devient l'otage d'un pouvoir occulte, dont on
pressent qu'il existe et que l'on ne saurait nommer. Les faces sont masquées,
non identifiables, les complots rampent, les acteurs les plus impliqués se
réjouissent de leur coup, les vrais auteurs espèrent que cette invraisemblable
comédie aura pour eux son happy end. Les élus de la Droite s'énervent et
demanderaient à leur chef de se retirer. Voir leur champion anéanti devant
leurs yeux n'a rien d'agréable. Le chef est là pour leur faire partager la
victoire, non pour les amener à la défaite. L'assemblée triomphante de La
Villette est déjà oubliée. Il ne faut pas gagner hier, il faut gagner demain !
Et demain, leur répètent les sondages du moment, est incertain. Qu’attend-on ?
Que le Parquet financier proclame un jugement ? Oui, mais ce Parquet, qui a été
d’une célérité inhabituelle pour intervenir, pourrait, pour les mêmes raisons,
être d’une lenteur épuisante à donner ses conclusions ! Et les élections
approchent ! Sur les lèvres et dans les cœurs, une seule question : Fillon s'en
sortira-t-il ? Comme si s'était la bonne question ! Pour trouver la réponse,
changer la question Supposons le scénario le plus sombre : Fillon retire sa
candidature à la présidence, il se désiste de la campagne électorale et, avec
sa femme, ils partent quelques mois dans les Caraïbes. Les enquêtes du Parquet
financier n'auront plus aucun intérêt et, dans six mois environ, un non-lieu
sera probablement prononcé. Plus personne ne s'intéressera aux emplois
supposément fictifs de Penelope ! Autrement dit, ce n’est pas aux actes légaux
ou moraux du candidat que l'on s'intéresse. Mais c'est au candidat qui a
remporté le vote incontestable que l'on sait, au soir de la primaire de la
Droite, et qui représente une force politique dangereuse ! Et ce candidat n'est
pas seul ! Il a déjà derrière lui quelques millions de citoyens qui ont
manifesté avec leurs pieds et leurs mains quel type de personnalité, quel choix
de société, quelle sorte de gouvernement ils souhaitaient. Ce n'était pas une
force en fin de course ! C'était une force en début de course. Une force qui ne
pouvait que grandir, se développer, et vaincre ! Cette force-là, il fallait la
miner, la disséminer, l'anéantir, la faire mourir ! 1 Quousque tandem,
Catilina, abutere patientia nostra ? est une expression latine tirée de la
première des quatre Catilinaires de Cicéron. Elle signifie : «Jusques à quand,
Catilina, abuseras-tu de notre patience ?» Ces mots violents constituent
l’exorde du premier discours contre Catilina prononcé par Cicéron le 8 novembre
63 av. J.-C. pour démasquer et punir la deuxième conspiration de Catilina, une
tentative de coup d'État contre la République romaine. Catilina était
impudemment présent ce jour-là parmi les sénateurs, alors que sa tentative
d'assassinat de Cicéron et son complot venaient d'être découverts. 1 Il fallait
dès maintenant lui couper sa voie électorale, lui voler son droit de
s'exprimer. L'affaire Fillon, ce n'est pas une attaque maladroite sur la
réputation d'intégrité d'un homme : c'est la spoliation concertée du droit
moral du vote, l'attaque camouflée de l'authenticité d'une démocratie
politique. François Fillon s'en sortira-t-il ? Non, si l'on continue à se
centrer sur cette question. Car tout a été fait pour qu'il ne s'en sorte pas !
Comprendre le processus Pour comprendre l'importance de la stratégie, il faut
analyser minutieusement le processus. Le Canard enchaîné reçoit un dossier.
Lequel ? De qui ? Le saura-t-on jamais ? Si, comme le laisse entendre la rumeur
publique, c'est une fuite du Service des Impôts, ce dossier donne au journal
une matière sur laquelle travailler. Car les salaires de Madame Fillon ont été déclarés.
On fait simplement l'impasse sur cette faute grave contre l'obligation du
secret professionnel, une faute grave qui relève du Code pénal ! Il faudra, un
jour, faire la lumière sur cette faute grave. Le journal commence son
«travail». Il ne s'agit pas seulement de comptabiliser les montants et
d'aligner les jours de travail. Il s'agit de faire de cette «matière» non un
simple fait, mais une cible médiatique. Véritable mob trigger (déclencheur de
la populace), le Canard enchaîné est spécialiste en ce domaine : rappelons-nous
les diamants de Bokassa évalués bien au-dessus de leur valeur, les emplois
fictifs reprochés à Juppé, etc. La technique est simple : dépouiller les faits
de tout leur contexte, de toutes les circonstances réelles qui les entourent.
Les rendre totalement nus. On exagère les chiffres – montant brut et non net –,
on minimise les périodes de rémunération, on évite de dire que le geste est
légal, que les montants ont été déclarés aux impôts. On présente Madame Fillon
comme une «bonniche», alors qu'elle est juriste de profession, capable de
fournir une contribution professionnelle à son mari, membre du Conseil
municipal de son village, etc. Le fait, une fois dépouillé de toutes les
décisions humaines qui l'ont engendré, réduit à sa seule matérialité, devient
ainsi une pâture bonne à être jetée aux chiens. L'on est sûr de l'effet qu'il
produira, de l'effet que l'on veut qu'il produise. À partir de ce moment,
l'homme politique pris dans les filets dans lesquels on l'a enfermé sera
condamné, quoiqu'il fasse pour rétablir la vérité humaine de ses actes. Tout ce
qu'il dira se retournera contre lui. Fillon dit qu'il n'y a qu'un compte en
banque, au Crédit agricole de Sablé. On dit qu'il ment ! Obligatoirement, il
doit avoir un compte administratif et un compte personnel ! Qu'il veuille
simplement affirmer qu'il n'a pas de compte caché à Singapour, à Genève ou à
Kuala-Lumpur ! Peu importe ! Il ne peut pas dire qu'il n'y a qu'un compte,
puisqu’il en a deux ! Madame Fillon dit, en 2007, qu'elle n'a jamais été
l'assistante parlementaire de son mari, autrement dit, elle ne joue, ni ne veut
jouer, les Carla Bruni ou les Cherie Blair. On ne veut retenir qu'une chose :
elle n'a pas travaillé pour son mari ! Ce processus est connu ! C'est celui de
tous les accusateurs publics, depuis Marc-Antoine, le Sanhédrin, Cromwell,
Fouquier-Tinville et aliis. Contre ce processus, la défense est perdue d'avance
! Plus Fillon tentera de se défendre, plus il s'enfoncera ! Plus on se
demandera s'il en sortira, moins il en sortira. Ce n'est pas Fillon qui est
vraiment accusé ! C'est le peuple lui-même ! C'est le peuple que le hollandisme
finissant, moribond, a méprisé, ignoré, injurié, trompé, qui est attaqué. C’est
ce peuple, qui a commencé à dire qu'on abuse de sa patience, qui est bafoué !
Ce peuple qui veut en finir avec les conciliabules des «énarques», avec les
théories sociologiques des Pierre Bourdieu en matière d'éducation, avec les
manipulations des Taubira et de ses amis, qu'on veut à tout prix faire taire.
Ce peuple à qui l'on veut opposer un Macron télégénique, sans assise politique,
sans expérience de gouvernement, aux théories économiques de Thomas Piketty.
Une façon de s'échapper du filet ! Tant que la Droite se dissociera de son chef
et qu'elle continuera à douter d'elle-même, elle est finie. Bientôt, avant la
fin de la campagne électorale, elle sera morte ! Ce ne sont ni les Juppé, ni
les Larcher, ni les Bayrou, ni aucun autre qui maintenant, à 70 jours des
élections, peuvent remplacer Fillon. François Fillon a mis trois ans à
construire son programme, il a parcouru toute la France, il a interrogé toutes
les catégories d'électeurs. Il a bâti un programme en consultant des experts et
des hommes de terrain. On a tout à fait le droit de critiquer ses solutions, tout-à-fait
le droit de dire sur quoi l'on n'est pas d'accord. On ne peut, tout de go,
faire le jeu du pouvoir occulte, le mettre sur une tablette et croire que
l'espoir que l'on a mis en sa personne se reportera sur un quelconque valet qui
endossera sa livrée ! C'est de la pure folie. Forcer le retrait de Fillon pour
la Droite, c'est se suicider. Une bonne partie des électeurs, dégoûtés, ne
voteront pas ! L'absentéisme aidant, ni Macron, ni encore moins Hamon, plus
rien n'empêchera le FN de l'emporter. Et si Macron, par miracle, l'emportait ?
La République serait-elle gouvernable, face à quelle Assemblée législative ? Il
n'y a qu'une façon de sortir du tunnel ! Une seule ! La COLÈRE. Le peuple
français doit dire qu'il en a assez d'être méprisé. Il doit le dire, haut et
fort. Il doit le dire avec colère, c'est-à-dire avec la véritable vertu qui
régule la colère : la vengeance. Car, la vengeance, nous dit saint Thomas, est
la vertu de la colère (S.Th., IIa-IIae, q. 108). Elle a comme objet de détruire
le mal, pour que le bien soit possible. Le peuple doit le dire non seulement
dans le secret des urnes, mais il doit le dire partout, en famille, dans les
salons, à l'usine, à son cercle d’amis. Il doit dénoncer les accusations
fausses, dénoncer les manœuvres qui spolient ses droits. Il doit reprendre les
mots d'ordre de son hymne national : Aux armes citoyens ! Non pas s'armer de
Kalachnikovs, mais se munir du bouclier de la vérité dans l'intelligence, du
feu de l'amour du bien commun dans la volonté, du courage dans l'irascible et
de la tempérance dans les moyens. Autrement, nous deviendrons un peuple
d'esclaves ! Et cela, ce n'est pas français !
Aline
Lizotte, Fondatrice de l’Association pour la Formation Chrétienne de La Personne.
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