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Suite du cycle consacré à Henri
HUDE. Je vous prie instamment de lire ce texte sans passion, en vous demandant s’il
est rationnel et juste, et ceci à chaque étape du raisonnement.
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Ce n’est pas l’ignorance qui nous
empêche de devenir vrai, c’est la lâcheté !
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1. LA CITATION DU JOUR.
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"Le cas le plus significatif
[de la liberté sociale] est celui de l’avortement. La liberté pour la femme
(sujet actif) d’avorter est évidemment l'obligation pour l’enfant conçu (sujet passif) de
cesser de vivre. On peut tourner les choses comme on voudra, il reste que, si
la femme est libre d’avorter, l’enfant ne l’est plus de vivre, et que si
l’enfant est libre de vivre, la femme ne l’est plus d’avorter. Soit donc le
débat entre les partisans et les adversaires de l’avortement, que j’appelle
respectivement abortionnistes et abolitionnistes.
Toute la question se concentre
d’abord sur la question de savoir si l’enfant conçu est sujet de droit. Car
même si la femme peut être dispensée, dans l’intérêt même de l’enfant, de son
obligation de l’élever, il ne saurait être question d’ôter la vie à l’enfant,
dès lors qu’il serait une personne et un sujet de droit.
On affirmera : mais ce n’est
pas une personne ! La vérité, c’est que ceux qui parlent ainsi n’en savent
rien. Ils peuvent bien répondre alors que les autres n’en savent rien non plus.
Quand même cela serait vrai, il resterait que nous serions tous dans le doute.
Or il suffit qu’il y ait un simple doute pour rendre l’avortement injustifiable.
Si nous sommes dans le doute, alors nous prendrions le risque de devenir
homicides. Assurément, il n’est pas possible de prendre en conscience un tel
risque, ou alors on pourra se permettre n’importe quoi. Pour que l’avortement
soit moralement et légalement possible, il ne suffit pas qu’on ne puisse pas
prouver que l’enfant serait une personne, il faudrait pouvoir prouver que ce
n’en serait pas une. La charge de la preuve incombe toute entière à
l’abortionniste.
On objectera que les partisans du
droit à l’avortement sont souvent des matérialistes, et que les mots d’âme, de
personne, d’esprit n’ont pour eux aucun sens. Mais s’il en est ainsi, la notion
de droit n’en aura pas davantage. Il n’y a pas de droit dans une motte de
terre, ni dans du protoplasme. Si on pense que l’homme a des droits, de quelque
manière qu’on le conçoive, c’est qu’on admet qu’il y a dans l’homme quelque
chose de plus : âme, esprit, quelque chose qui le rend supérieur à l’ordre
des choses matérielles et simplement vivantes, quelque chose qui force au
respect, sans quoi on pourrait le traiter comme de la matière, ou comme un
simple animal. Or ce plus qui fait l’homme et sans l’affirmation duquel il n’y
a ni droit ni société civilisée, ce plus ne peut être que d’ordre métaphysique,
ce qu’on appelle esprit."
In
Henri HUDE.
Éthique et politique. Collection
"Philosophie européenne".
Chapitre XII. Liberté et justice.
Section 13 : L’avortement.
Éditions Universitaires, Mame,
Paris, 1992, pp. 266-267.
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2. COMMENTAIRES.
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Bien entendu, cette analyse n’est
pas très tendance. Néanmoins, elle a un mérite immense, celui d’être argumenté
et fondé en raison pour ceux d’entre nous qui croyons que l’homme ne se réduit
pas à la matière ou qu’il est ontologiquement différent d’un animal. Elle
prouve surtout que la matière ne peut être sujet de droit, et que si nous
reconnaissons à l’homme cette capacité, il faut alors prouver que l’embryon
n’est pas un homme, et se demander à partir de quel moment il le devient. Dans
le droit actuel, l’enfant devient sujet de droit, lorsque, sorti du sein de sa
mère, il en est séparé par la section du cordon ombilical.
Dans la mesure où l’embryon se
développe dans le temps et dans l’espace, dans la mesure où les théories
physiques nous disent que ces deux concepts expriment la même réalité, que le
temps et l’espace sont en fait équivalents, il est légitime de croire que la
personne humaine est totalement présente dans l’embryon, de sa conception à sa
mort.
La confusion des esprits vient de
ce que l’on ne sait pas faire la différence entre le for interne et le for
externe, et que s'il est nécessaire de condamner moralement l’avortement, il ne l'est pas de condamner les femmes qui y ont recours. C’est très exactement ce que
Jésus a fait avec la femme adultère : « Personne ne t’a
condamnée ? ― Personne, Seigneur. ― Moi non plus, je ne te condamne pas.
Va et désormais ne pèche plus ! »
Tout est dit dans cette parole de
miséricorde qui renvoie les pharisiens à leurs propres péchés, et la femme
adultère à sa conscience.
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