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Christian est un petit bonhomme
plein de malice. Il est arrivé en France il y a 8 mois, sans connaître un mot
de français. Tous les soirs ou presque, on peut le voir Porte de Saint-Cloud,
devant le Mc Do qui fait l’angle avec l’avenue de Versailles, assis au pied d’un
arbre, sagement, entre son papa et sa maman. Tous les trois, ils sont protégés
par une couverture. Aucun d’eux ne réclame, aucun ne demande quoi que ce soit aux
passants indifférents. Seule, une tasse de carton calée entre les jambes du
gamin lesquelles font saillie sous la couverture, indique que les trois s’en
remettent au regard de l’autre.
Il y a quelque jour, j’ai demandé
à Christian s’il parlait français ; il a répondu que oui, qu’il allait à l’école ;
lors, ce bref dialogue m’a valu de connaître son prénom. Le papa et la maman
ne parlent pas notre langue. Les deux sont recrus de fatigue, de lassitude, et
d’une sorte d’indifférence qui confine au désespoir. Je n’ai pas pu savoir où
ils passaient la nuit. J’apprends que Christian a un grand frère qui apprend le
métier de boulanger.
Tous, ils viennent de Roumanie,
victimes d’une ancestrale hostilité qui frappe leur peuple, le peuple des Roms.
Il est trop facile de généraliser
et de dire « les immigrés ». Certes, il convient de discerner. Mais ce n’est pas cette abstraction qui
est en cause quand on croise une telle détresse. Je me moque complètement du
jugement qu’on pourra porter sur mes propos. Ces frères en humanité sont là, je
les vois, je peux les toucher, leur parler, les écouter. Et je me souviens
alors du bon Samaritain, non que je me compare à cet homme si bon. Non !
Je me souviens simplement des paroles du Maître : lequel de ces trois – le
prêtre, le lévite ou le Samaritain – a été le prochain du blessé ? Je
trouve là une raison suffisante pour essayer à la mesure de mes pauvres moyens
de me rendre proche de ces frères en humanité.
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